Le conseil départemental dans la tourmente

Marc Giraud condamné doit quitter ses fonctions

Jugé par le tribunal correctionnel de Toulon le 7 octobre pour emploi fictif lorsqu’il était maire de Carqueiranne, le président en exercice du conseil départemental a été condamné pour détournements de fonds publics à 2 ans de prison avec sursis et devra démissionner dès l’envoi de la sentence ou il sera démis de ses fonctions par le préfet.

Cela n’a guère dû surprendre grand monde car cette tricherie aux dépens des finances publiques concernait Patricia Arnould adjointe au maire de La Crau qui émargeait au budget de deux commune voisines avec celle de Carqueiranne pendant la période allant d’octobre 2011 à juin 2015 sans avoir la moindre activité liée à la seconde… jusqu’à ce qu’elle soit élue en binôme avec Marc Giraud conseillère départementale en 2015 tout en restant adjointe au maire de La Crau !

Elle avait été mise en examen et en garde à vue le 16 juin 2015 pour recel de détournement de fonds publics. La garde à vue avait été levée moyennant une caution de 30.000 euros ! Elle en avait les moyens cumulant l’indemnité d’adjointe et le salaire de cadre administrative à la mairie d’à côté. Petis arrangements entre amis. “Non“, vient atténuer le quotidien VM :”une forme de confusion entre les activités politiques de Patricia Arnould…” Tu parles, c’était juste une petite erreur, pardi !

Marc Giraud n’était pas à une près. Il quittait son fauteuil de maire en 2014 pour devenir le président du conseil départemental. Il était, lui aussi, sous le coup d’une mise en examen en juillet 2015 pour le même motif et sous le coup d’une enquête ainsi que son directeur de cabinet et le directeur général des services pour une autre “affaire” touchant à l’immobilier. Il a payé la même caution de 30.000 euros sans difficulté pour poursuivre ses activités sept années durant !

On était encore à l’époque de la domination écrasante des LR dans le Var qui sous l’autorité du grand patron, H. Falco, pouvaient tout se permettre ou presque puisqu’ils avaient la confiance des électeurs, ils étaient donc légitimés dans tout ce qu’ils faisaient selon le raisonnement du chef lui-même mêlé dans l’affaire des “enveloppes du sénat” avant de l’être dans “l’affaire des frigos” du conseil départemental qui doit être jugée prochainement ainsi que Marc Giraud !

L’année 2015 avait été riche en scandales accrochés aux basques de quelques maires LR, comme celui de Roquebrune-sur-Argens, Luc Jousse lui aussi condamné en appel pour détournements de fond publics et qui se disait harcelé par la justice. Il a dû quitter ses fonctions suite à un rapport de la Chambre régionale des comptes très sévère concernant sa gestion de la commune. Très vite le RN s’intéressa à lui.

A Sanary, la même année, le maire, Ferdinand Bernhard, était, déjà, mis en examen pour plusieurs faits de favoritisme, détournements de fonds publics, et prise illégale d’intérêts. Il aura tenu sept ans lui aussi avant de perdre son siège et de laisser la place à un de ses co-listiers en 2020 qu’il “piloterait” à distance selon les échanges récents en conseil municipal ? L’ancien maire “oubliait” aussi de déclarer une forte partie de ses revenus.

A Bandol, la majorité de droite se disputait joyeusement. Au Castellet l’indéboulonnable Gabriel Tambon, maire UMP de 1965 à 2015 a tenu 50 ans avant d’être poussé vers la sortie pour “corruption passive, usage de faux, escroquerie et délit dans l’attribution des marchés publics“. Le tout aggravé par du “harcèlement moral“. Reconnu coupable en mai 2015 il devait renoncer à toute fonction publique.

A Brignoles la députée-maire Josette Pons qui fut également maire de Saint-Cyr et maire du Beausset avait été l’objet d’une plainte du procureur de Paris concernant la sincérité de sa déclaration de patrimoine, après un signalement de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique qui émettait en juin 2015 “un doute sérieux…quant à la sous-estimation manifeste de certains actifs et de l’omission de certains biens mobiliers” .

Elle se déclarait “sans profession”, alors qu’elle avait trois sources d’indemnités plutôt très confortables : député, maire et vice-présidente du conseil départemental. Rien que ça, même s’il y avait quelques limites au cumul de mandats !

En avril 2017, sentant venir le vent, elle renonçait à son mandat de députée. Elle a été exhaucée : en 2022 le RN a pris son siège faisant carton plein ou presque à l’échelle du Var ! L’éclatement de LR et les politiques de Macron que soutient désormais Falco ont été de puissants moteurs aux tranferts de voix de la droite vers l’extrême-droite qui n’a laissé qu’un siège sur huit aux sortants LR.

Certes ils gardent encore une majorité de sièges au conseil départemental mais ils sont encore plus divisés, entre les “légitimistes” fidèles au parti de droite longtemps dominant en France et dans le Var dont le leader est passé, non pas à l”ennemi, ce sont tous des libéraux, mais au concurrent nommé Macron, lui-même très affaibli car ne disposant plus de majorité propre.

Et ça continue

Dans le Var, après avoir “pris” La Seyne, aujourd’hui c’est la guerre ouverte entre clans au sein de la liste des droites, la maire LR et son 1er adjoint LR s’envoient des fleurs à longueur de journées…à tel point qu’ils ne peuvent plus se sentir !

Ils s’accusent d’incompétence mutuelle et se disputent publiquement et sans arrêt depuis le début de leur mandat. Leur électorat conservateur risque de se tourner encore plus…à droite au bénéfice de qui ? Leurs ambitions politiques sont au coeur de leurs divisions. Quel spectacle ? La gestion de la ville ressemble à un bateau à la dérive. La population en fait les frais.

Voilà l’état-major LR chapeauté par J-L Masson maire de La Garde devant une situation très embarrassante vu la claque des dernières présidentielles et législatives avec les réglements de comptes un peu partout avec en fil conducteur à droite : “avec le RN ou pas ?” Ce dernier appelant à la concorde pour accéder au pouvoir et mieux masquer son projet ultra-conservateur et nationaliste.

La propension de Macron à privilégier les maîtres de l’économie et de la finance pour imposer au peuple pénuries et inflation ne peut qu’ajouter des privations aux inégalités et accroître la précarité, la grande pauvreté donc les colères sociales les plus légitimes tout en sacrifiant les objectifs climatiques proclamés.

Corruption et clientélisme s’y développent à souhait : ils ne sont pas tolérables, certains élus se croient intouchables à tous les niveaux. A force de dire qu’il ne faut pas généraliser, c’est vrai, mais mêmes minoritaires, les motivations et les méthodes de trop d’élus de premier rang finissent par faire douter de celles et ceux qui ont leur conscience tranquille et pas de plans de carrière en vue. Et plus encore les électeurs !

Il y a un lien entre les privatisations et la généralisation des “affaires” (et de leurs secrets), un lien avec le “tout marché” où le respect des régles commerciales et administratives pourtant favorables s’avère accessoire dans nombre de cas. Trop souvent contourné par le culte du résultat à n’importe quel prix. La “carotte”, les dessous-de-table, les cadeaux, les voyages, les relations les plus risquées…tout est permis pourvu qu’on enlève le marché, il n’y a que le résultat qui compte.

Les prises illégales d’intérêts reprochées au plus haut niveau de l’Etat sont tolérées par l’Elysée qui demandait pourtant le retrait des ministres et députés mis en examen ?? On ne comprend que trop.

Le Var non plus ne manque pas d’illustrations. Il ne lui manque qu’une perspective…à gauche en train de se reconstruire.

René Fredon

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