Oui, les parents d’élèves en rêvent ! Pourquoi ? C’est tout simple, c’est bon pour la santé des enfants. Ils sont les plus heureux de savoir que chaque jour leurs petits mangent des produits sains et naturels plutôt que des produits industriels, beaucoup plus pauvres en termes de qualités nutritives. En même temps on les éduque au goût et à de bonnes habitudes alimentaires. Et en même temps, en plus, les inégalités sociales sont réduites, puisque lorsque la commune pratique des tarifs sociaux tous les enfants peuvent bénéficier d’un repas complet et équilibré. Tous ces éléments positifs pris bout à bout, c’est bon pour le moral !
Mais aujourd’hui, dans les cantines, les achats alimentaires en bio plafonnent à moins de 4 % et on ne sait pas grand-chose de la part du local. Une loi va venir chambouler tout cela ! À partir du 1er janvier 2022, les gestionnaires de restaurants collectifs publics devront proposer 50% de produits de qualité et durables, dont 20% biologiques. Et là, il faut trouver rapidement des solutions alternatives pour appliquer la loi ! Sur notre commune, à Ollioules, la municipalité a installé ces dernières années de jeunes agriculteurs qui fournissent des crudités ou salades pour les scolaires. C’est une bonne nouvelle. Cela va bien dans le sens de la loi EGalim. Ce serait bien de savoir où nous en sommes par rapport aux attentes du législateur car 2022 se profile ! Pour aider les collectivités locales à réaliser ce challenge, le ministre de l’agriculture et de l’alimentation, Julien de Normandie a décidé d’une enveloppe de 50 millions d’euros et ce financement était accessible dès janvier 2021.
Pour aller un petit peu plus loin dans notre réflexion, on peut dire que tout ça c’est bon pour nos agriculteurs aussi, eux qui sont des acteurs importants de notre économie locale. Autrefois, nos paysages agricoles étaient très diversifiés. Mais aujourd’hui nos régions agricoles sont très spécialisées et presque toute la production est exportée tandis que presque tous nos aliments sont importés. Si on prend le Var, notre production est nettement insuffisante pour couvrir nos besoins mais par ailleurs la surface agricole biologique est de 19 581 ha ce qui représente 17 % de sa SAU (Surface Agricole Utile) totale soit 2,2 fois la moyenne nationale. Le territoire du Var est très bien classé ! Il présente une Haute Valeur Naturelle au regard de l’expertise agroécologique. D’après moi il faut encourager les jeunes à s’installer car la profession ne représente plus que 3 % de la population active et elle est vieillissante. Voici donc arrivé l’argument de l’emploi. Reconsidérer l’agriculture, commencer par les cantines scolaires et éduquer nos enfants afin de les sensibiliser comme le fait la commune de Mouans Sartoux.
A Mouans Sartoux la cantine scolaire est 100 % bio, les produits sont sans intrants chimiques. Une régie agricole lui est dédiée. La production agricole annuelle est de vingt tonnes et les déchets sont recyclés. Cette histoire a débuté dans les années quatre-vingt-dix. Tout a commencé par l’inclusion de produits naturels dans les menus avec la volonté radicale de « ne plus exposer les enfants à des produits industriels potentiellement mauvais pour leur santé et l’environnement ». En 2009, la proportion de bio était de 25 %, de 50 % en 2010 et de 100 % en 2012. Adieu pesticides et intrants chimiques ! Sur le site de la mairie on peut lire : « L’objectif prioritaire est de proposer un repas respectueux de la santé de l’enfant en terme d’équilibre alimentaire et de qualité de produits. »
Différents leviers sont utilisés pour réduire les coûts, éviter le gaspillage et respecter l’environnement. Des mesures de gestion des déchets ont été mises en place, on a adapté les quantités de nourriture par rapport à la consommation réelle des enfants (chaque élève choisit sa propre portion et peut obtenir du rab à volonté), une partie des repas est préparée en direct…
L’enjeu d’un tel engagement est de ne pas « cultiver des enfants à devenir de futurs consommateurs de produits industriels, d’être connecté à l’origine des choses que l’on met dans sa bouche. » Finalement la cantine est autonome à 80 % en légumes. C’est une relocalisation qui fonctionne. C’est bien ancré dans les habitudes et surtout c’est économiquement pérenne ! Dans cette dynamique le PLU en 2012 a triplé la surface réservée aux activités agricoles de la région et on est passé de 42 hectares à 119 hectares.
D’autres communes ont franchi le pas comme Bègles en Aquitaine depuis 2006. Elle est labellisée Territoire Bio Engagé par InterBio Nouvelle Aquitaine ou Bruz (vers Rennes) qui sert 1400 repas par jour dans trois écoles et deux crèches. La ville s’est équipée d’une cuisine centrale et travaille avec les produits de proximité. Toutes ces actions sont des actions structurantes pour les collectivités et pour les agriculteurs qui sont correctement rémunérés. Si les produits bio sont plus chers, on peut relever le défi en agissant sur un certain nombre de facteurs. C’est la présence d’un repas végétarien par semaine, la réduction du gaspillage…L’argent économisé est réinjecté dans l’assiette de l’enfant.
Mais les collectivités qui s’engagent vont plus loin. L’enjeu est éducatif. On forme l’enfant au goût mais aussi on lui apprend à donner son avis, à respecter l’avis des autres. Le produit doit être attractif alors on accompagne le plat jusqu’au bout et on le présente aux enfants. On travaille avec des diététiciens sur l’équilibre alimentaire et la qualité des aliments. On intègre tous les acteurs de la filière. Mais j’allais oublier de citer la petite commune alsacienne d’Ungersheim qui projette de tendre vers la souveraineté alimentaire ! Un beau challenge !
Mouans Sartoux est allée visiter un autre domaine, celui de la complicité avec les parents d’élèves. Et les familles reçoivent des idées de recettes. « Nous avons réalisé deux études qui montrent que 85 % des parents ont modifié leurs habitudes alimentaires à la maison » (propos de l’adjoint Gilles Pérole).1
Une belle dynamique !
1Reporterre, La cantine bio de mouans Sartoux nourrit bien élèves et paysans, Samantha Rouchard, 4 juin 2018
Claudie Zunino Cartereau