Raymond Hamoneau, une carrière au service de l’humain

Propos recueillis le 23 avril et publiés le 29 juin 2021

Claudie Zunino-Cartereau

Bonjour Raymond

– Bonjour Claudie

Je te remercie d’avoir accepté cet interview afin de nous relater ton expérience, étayée par ta carrière dans le domaine socioéducatif et le champ du handicap. Ton parcours est particulièrement intéressant. Tu as travaillé dans des structures variées, même géographiquement, avec des publics très différents. Alors tu pourras nous parler un petit peu de toutes tes expériences et nous raconter celles qui t’ont le plus marqué.

J’ai commencé ma vie professionnelle en 1978. J’ai travaillé comme éducateur d’internat. A l’époque,je n’étais pas diplômé mais j’avais exercé diverses activités (soit d’animation et autres ). J’avais quelques connaissances du terrain. J’avais déjà fait une formation d’un an interrompue parce que les Centres Privés de Formation d’Éducateurs (dont celui d’Aubagne) fermaient les uns après les autres. C’était en 75 et du coup je me suis retrouvé sur le terrain sans formation.

J’étais jeune. Entre temps j’ai fait le service national dans la Marine Nationale. Je suis parti en Polynésie. J’ai été assistant de foyer. J’avais une autre expérience d’animation et puis au retour en discutant avec de nombreuses personnes qui étaient dans ce milieu ou qui l’avoisinaient, j’ai décidé de faire ce métier d’éducateur.

En 78, j’étais à Collobrières. J’y suis resté jusqu’en 83. C’étaient essentiellement des enfants qui avaient des déficiences physiques et/ou mentales. Après je me suis occupé d’adolescents psychotiques, épileptiques ou souffrant d’autres formes de maladies invalidantes. Ce fut ma première expérience professionnelle. De là, j’ai entamé une formation sur Toulon et je l’ai terminée comme éducateur. Ensuite j’ai quitté Collobrières pour Salernes. Là, J’ai travaillé à l’Institut Médico-Pédagogique communal du Haut Var (en tant qu’assimilé fonctionnaire public territorial). J’ai exercé en tant qu’éducateur d’internat auprès d’adolescentes. Je m’occupais de jeunes filles âgées entre 14 et 18 ans. Ce fut ma deuxième expérience.

La troisième, c’était à la Seyne sur Mer où je suis arrivé en 87 et ce jusqu’en 92. J‘ai exercé en tant qu’ éducateur spécialisé sur la cité Berthe, la cité du Messidor, puis plus tardivement sur celle de la Présentation. J‘avais en responsabilité trois secteurs. Je travaillais au sein de l’O.M.AS.E qui était L’Office Municipal d’Action Socio-Éducative de la Seyne-sur-mer qui deviendra sous forme associative l’A.P.E.A (Association pour la Prévention des Enfants et Adolescents). Nous couvrions essentiellement les quartiers sensibles de La Seyne. Depuis j’ai appris que cette association s’est très étendue et qu’elle couvrait d’autres secteurs (dont Sanary). C’est l’une des expériences qui m’a le plus marquée, parce-que nous étions confrontés au réel, aux jeunes et aux familles en difficulté qui vivaient dans les cités mais pas que puisqu’il y a avait aussi des jeunes qui venaient de quartiers différents. C’était très enrichissant sur le plan social et éducatif d’ un travail de prévention à réaliser auprès de ces populations.

De là, j’ai ensuite été au Centre Pédiatrique “Plein Sud où” de Six-Fours où j’ai été employé sur un poste d’éducateur spécialisé avec une fonction de “formateur” pour les personnels “TUCs (Travaux d’Utilité Collective). Je devais également prendre en charge les emplois du temps des Auxiliaires Puéricultrices et celui des Psychologues. J’avais également des temps de réunion et je prenais en charge des ateliers pédagogiques pour des enfants de 0 à 6 ans confiés par la justice avec leur maman. J’ai exercé huit mois en C.D.D et ensuite je suis parti en Polynésie.

Là, c’était un autre travail qui m’attendait avec un autre climat social aussi. Au départ j’étais éducateur patenté. Cela n’existe pas en France. Je payais “ma patente” auprès des impôts, ensuite j’intervenais auprès des associations de personnes handicapées. Le public rencontré était composé de plusieurs déficiences (sensorielles, motrices, mentales, polyhandicapées). Je travaillais pour trois associations dont l’une d’entre elles, “TURUMA” (qui signifie “Groupe d’Aide”) se situe à Papenoo sur la côte est de Tahiti. J’ai été par la suite élu président de cette association pour quatre ans. C’est resté une expérience très intéressante, enrichissante. Ensuite il y a eu l’ouverture d’un Foyer d’Accueil Éducatif d’ enfants. Nous y avons accueilli des enfants de trois à douze ans. Il y avait dix garçons d’un côté, dix filles de l’autre. Nous étions une équipe éducative de 6 membres. Nous fonctionnions sur le mode des 3/8 (le matin, l’après-midi et la nuit). De là ensuite j’ai passé mon concours pour être fonctionnaire territorial et j’ai intégré la circonscription de Pirae (à l’est de Tahiti) de Moorea et des Tuamotu Est. J’ai travaillé sur Tahiti, Moorea, (l’île sœur de Tahiti)et onze atolls. J’ai eu la chance de faire des tournées administratives et de voir comment pouvait se vivre la misère sociale sur les atolls. Parce que, tout n’est pas entièrement beau sous le soleil. Il y a également de gros problèmes qui peuvent se présenter (carences éducatives, violences conjugales, parfois inceste, difficultés du quotidien -à part la pêche et la coprah culture- ce n’est pas un tourisme important qui se déplace sur les atolls les plus reculés).

Je suis revenu en France fin 2000. J’ai participé à la création avec des collègues de la Veille Sociale Enfance, un service qui dépend du Centre Départemental de l’Enfance (fonction publique hospitalière). Nos missions étaient de contrôler le retour des enfants dans leur famille en soirée ou en week-end, voire pendant les vacances scolaires. Les situations nous étaient désignées. J’y ai travaillé quatre ans de 2000 à 2004. En mars 2004, j’ai intégré la fonction publique territoriale : le Conseil Général (appellation de cette époque) , dans le service de l’Aide Sociale à l’Enfance à l’Unité Territoriale et Sociale de La Seyne-sur-Mer – Saint-Mandrier sur Mer jusqu’à ma retraite en 2018.

Après tout ce que tu m’as dit quelles sont les pratiques rencontrées qui t’ont paru les plus intéressantes dans le domaine socio-éducatif ?

Dans le domaine socio-éducatif, c’est vrai qu’il est parfois difficile de faire des choix.Pour ma part, je suis toujours parti en ayant un autre emploi d’assuré J’étais sûr d’y être bien accueilli, d’exercer au sein des équipes sympathiques et surtout de pouvoir vivre d’ un travail qui correspondait à ce que j’attendais à ce moment-là.

Pour autant, celle qui m’a le plus marquée demeure la prévention spécialisée : celle où j’étais éducateur de rue à la Seyne sur mer, de 1987 à 1992. J’ai pu percevoir quels pouvaient être les problèmes rencontrés sur le terrain par ces jeunes, par ces familles. Et puis grâce au partenariat que nous entretenions avec d’autres structures, voir en effet quelles pouvaient être les réponses que nous y apportions. La prévention est une chose très importante à mes yeux parce que, en amont déjà je pense qu’il faut commencer avec les jeunes enfants. Les principes éducatifs doivent être mis en place auprès des enfants avant 5 ans par les parents…. Hélas, souvent les familles sont dépassées par les agissements de leurs enfants et en prennent conscience trop tardivement.

En plus la prévention pour un éducateur de rue ne peut pas se faire comme nous le voyons actuellement dans certaines communes par des caméras qui sont implantées par ci, par là pour surveiller telles ou telles actions illicites que pourraient commettre les jeunes. Je pense que cela devrait être débattu publiquement. Personnellement j’ai préféré ce contact humain et l’engagement sur le terrain, (discuter avec eux, voir vraiment ce qui est important de pouvoir exercer auprès d’eux pour leur maintenir un peu la tête « hors de l’eau » aux fins de les sortir de ces situations sociales difficiles, d’échecs scolaires mais également d’insertion dans le travail. Il y avait par ailleurs des violences familiales où nous étions tenus d’intervenir.

Ce qui est important c’est aussi de créer des lieux de permanence repérés par les jeunes. Pour exemple, dans le cadre de la structure de l’A.P.E.A, nous avions un local. Celui-ci était repéré par les jeunes. Ils venaient vers 16 h 30 lorsque nous ouvrions la permanence. Avant 16 h 30 nous étions sur le terrain. Une fois le local fermé, le travail continuait puisque parfois nous allions rencontrer des familles et nous prenions le temps d’aller au-devant des jeunes adultes qui avaient besoin de conseils.

Il y a nécessité,voire urgence aujourd’hui de poser un cadre et de ne pas se reposer sur un système de caméras ou de matériels . Rien ne peut se substituer à la présence d’éducateurs sur le terrain. Oui, les caméras peuvent avoir un impact de sécuriser certains lieux par rapport aux personnes qui y habitent. Mais les politiques mises en place déplacent le problème ailleurs. Pour vraiment répondre aux attentes de « baisser » le taux de délinquance, il est indispensable qu’il y ait des éducateurs et des éducatrices, des travailleurs sociaux sur le terrain aux heures de la journée et pas simplement le soir. Et moi, c’est ce qui m’a plu. C’était ce contact humain, ce contact comme je l’ai souligné avec les autres structures, y compris, des fois, quand c’était nécessaire, avec des psychologues, d’autres professionnels qui interviennent auprès des enfants,comme les CMP (Centre Médico-Psychologiques). Il y a un véritable poids socio-éducatif dans les quartiers, surtout quand les éducateurs sont repérés, quand ils sont bien intégrés dans la vie des cités aussi bien par les jeunes que par les familles. Nous pourrions en retirer des leçons , et je pense que de bons fruits. Et Finalement il est nécessaire d’accompagner ces jeunes. Je me souviens que nous avions un excellent rapport avec le Centre Culturel Espace Berthe qui est maintenant l’Espace « Nelson Mandela » et nous faisions un travail en lien très important. Il était situé sur mon secteur. C’était très bien pour pouvoir rencontrer les jeunes. Il y avait une vie culturelle et sociale sur la Seyne, à l’époque, qui était très intense et qui drainait toutes ces forces vives, tous ces jeunes et ces moins jeunes qui pouvaient se rencontrer. La prévention, c’est intervenir d’abord en amont. Il y a deux préventions : la prévention primaire qui est celle de rencontrer les familles, les jeunes en difficulté ou pas. Après, il y a cette prévention dites spécialisée qui intervient dans un cadre par rapport à ceux qui ont posé des actes pointés comme “répréhensibles”, avant que n’interviennent les forces de police ou autre, il est intéressant que l’éducateur puisse faire ce travail et dans le fond et dans la forme.

Il y avait aussi à l’époque des îlotiers. La rencontre des jeunes avec la Police Nationale avait un autre caractère. Les îlotiers faisaient un travail remarquable également. Ils étaient policiers mais c’étaient des policiers qui allaient sur le terrain, qui discutaient avec les jeunes et qui étaient aussi repérés, en tant que policiers d’un côté mais aussi avec ce travail de dialogue entre la police et les jeunes. Je pense que ce que j’ai vécu dans les années fin 80 et le début des 90, c’était vraiment le dialogue adultes/jeunes avec des représentants différents, soit la police, soit le monde éducatif, soit le monde social, les associations culturelles et sportives (La Jeunesse Sportive Seynoise, pour le foot, la Boule Bombée du Messidor pour les addicts au jeu de boule, GASPAR au Germinal etc.), permettait une cohésion sociale qui malheureusement a parfois disparue.

C’est bien d’avoir rénové, d’avoir fait de jolis bâtiments. Je ne sais pas ce qu’est devenue la jeunesse qui vit dans ces quartiers. Mais je crois que le monde culturel, malheureusement s’est un peu appauvri. Certaines associations ont fermé, d’autres se sont développées.

J’avais rencontré un jeune qui a créé entre temps un club de lutte et qui a eu beaucoup d’adhérents. Donc il y a quand même des activités qui ont été mises en place par des jeunes issus eux-même de ces cités et qui, peut-être aussi à un moment donné de leur vie, ont rencontré des problèmes mais s’en sont sortis grâce au sport, grâce à la culture même grâce à la politique puisque un jeune s’était inscrit sur une liste municipale. Et puis dans les cités, il n’y a pas que des cancres, des marginaux mais des gens qui réussissent dans leur vie et s’intègrent par leurs qualités dans la vie professionnelle et entrepreneuriale. Avec les éducateurs, les familles et les communautés parfois différentes, nous portions le lien social, celui du vivre ensemble, pas côte à côte mais ensemble. Je me rappelle de communautés qui étaient gitanes, et maghrébines, dont les jeunes avaient quelques difficultés à coexister. Un jour, j’ai décidé de « casser » leurs codes. Nous avions à disposition des minis bus et on pouvait prendre huit jeunes. J’avais décidé de prendre quatre jeunes d’origine maghrébine et quatre jeunes d’origine gitane. Au départ la mayonnaise n’a pas vraiment pris ; il y avait quelques préjugés d’un côté et de l’autre; Puis finalement, c’était l’été, donc nous sommes allés en bord de mer. Les jeunes maghrébins étaient allés se baigner et les jeunes gitans jouaient de la guitare sur la plage. Il y avait un ballon. Ils ont commencé à se passer le ballon. La plage que nous avions choisie se prêtait à leur jeu car il n’y avait pas grand monde. Le foot les a rapprochés. Je pense que les adultes doivent travailler dans ce sens là, faire dialoguer, faire rapprocher les diverses communautés culturelles. Un travail reste à faire dans l’implantation des logements, quand des bâtiments sont attribués à une certaine « communauté », et bien cette communauté vit dans son espace socio – culturel, elle ne communique pas avec d’autres, elle demeure renfermée sur elle-même. Mais lorsque des bâtiments, où il y a plusieurs communautés coexistent, se rencontrent,échangent, le dialogue s’instaure au sein de petits bâtiments avec des paliers couverts de plantes vertes. C’était très vivant tandis que d’autres bâtiments moins soignés voyaient l’apparition des graphes, la détérioration.

Le dialogue, les échanges peuvent se faire entre autres grâce aux travailleurs sociaux qui sont dans ces cités. Il y avait de la délinquance à la Seyne, je ne dis pas qu’il n’y en avait pas – cette délinquance n’était pas minimisée mais quelque part discutée avec ces jeunes.

Les grands dealaient. ils avaient peut-être autour de vingt ans. Ils disaient : “Tu vois, moi j’ai pas eu cette chance qu’ils ont mes petits frères et mes petites sœurs d’avoir des éducateurs. Toi, occupe toi des jeunes. Fais en sorte que eux ne tombent pas comme nous dans la drogue et dans le reste.” Il y avait donc une prise de conscience. Nous, au départ nous étions un peu des « tuteurs ».

Même si nous apprenons en formation la théorie : nous sommes « impliqués » ici dans le lien social, éducatif et sommes tenus par l’humain au cœur des cités.

La politique concernant les personnes handicapées doit-elle évoluer aujourd’hui ?

Tout système est perfectible. Nous n’atteignons jamais le summum.

L’évolution sur le plan des personnes handicapées peut et doit se perfectionner. En général, il y a toujours un manque de place, de prise en charge des personnes suivant les « handicaps ». Nous manquons de structures à taille humaine, et d’équipes éducatives et médico-sociales.

Il suffirait de revoir toute la politique relative aux personnes handicapées.

Je pense à cette « loi de 1975 » qui n’est toujours pas appliquée dans beaucoup de communes. Il faut développer l’accès au logement, l’accès aux administrations, aux entreprises.

Nous devrions repenser l’espace public et privé pour le rendre non seulement plus accessible aux personnes handicapées mais leur rendre une visibilité et une dignité qu’elles n’ont pas forcément aux yeux des personnes valides. Des quotas dans les entreprises sont mis en place, mais pas toujours respectés. Nous serions bien inspirés de leur donner des emplois rétribués à leur juste valeur et non pas des sommes dérisoires qui font que la personne handicapée s’inscrit dans une survie.

Si tu étais aux manettes quelles mesures prendrais-tu ? Au Conseil Départemental par exemple.

En ce qui concerne l’Action Sociale au Conseil Départemental, il y a de gros soucis institutionnels. Il n’y a qu’à voir avec le Centre Départemental de l’Enfance. La moitié du personnel (23 avril 2021) serait positif à la Covid. Il y a des problèmes de prise en charge aussi bien des enfants que du personnel. L’action sociale et la protection de l’enfance sont une prérogative du Conseil Départemental.

Des différences d’appréciation subsistent selon que nous travaillons en zone urbaine ou en zone rurale : les communes ne sont pas forcément desservies comme en ville. Il faudrait créer des services de proximité dans les milieux ruraux.

Sur le plan de la formation, nous avons la chance sur Ollioules d’avoir « La Croix Rouge » qui forme des éducateurs, des assistantes sociales, des infirmiers…. Nous avons la chance d’avoir un pôle attractif qui pourrait nous servir de « réserve ». Sur nos quatre communes que ce soit Sanary, Ollioules, Evenos ou Bandol, un effort demeure.

Entre parenthèses, je trouve catastrophique ce qui se passe avec le centre médical infantile « Les Oiseaux » à Sanary. Ce centre a sa raison d’être, nous en avons conscience.

Je pense qu’il faut revoir toute la politique relative au social. Essayer de diversifier l’accueil des personnes handicapées. J’aurais tendance à dire que j’aurais une politique offensive. Autant je suis dans l’aspect de la démocratie, de l’écoute, du partage, mais je pense qu’il y a des secteurs où nous nous devons d’être offensifs. Ne pas palabrer des heures et des heures, il faut à un moment donné prendre des décisions et les appliquer. L’action sociale, les personnes handicapées et la prévention sont des axes très importants. La politique départementale ne doit plus tarder à évoluer vers une prise en charge plus équitable et plus favorable aux personnes concernées. Trop de barrages administratifs, de lois votées par les uns et qui n’ont pas le temps d’être appliquées car d’autres parlementaires viendront en voter des supplémentaires pas forcément complémentaires .

Nous avons sur Ollioules « La Maison Départementale du Handicap ».

Pouvons-nous penser, un seul instant, qu’en rassemblant tous les problèmes dans une structure tout peut-être aisément réglé ?

Pour les enfants autistes, les familles doivent trouver une structure parfois en Belgique, ce n’est pas normal. La France, sixième puissance mondiale devrait pouvoir répondre aux besoins de ces enfants et des personnes handicapées.

Quels conseils donnerais-tu aux jeunes-gens qui veulent se lancer dans cette voie ?

C’est presque quelque chose que chacun(-e) se doit de ressentir en soi. C’est un métier de contact humain. Il est essentiel de posséder des qualités personnelles.

Quand j’ai commencé une collègue éducatrice m’a dit : “Tu connaîtras plus d’échecs que de réussites.” Déjà quand vous débutez dans ce métier, nous nous demandons ce que ça va être. Elle a eu raison de me le dire. J’ai toujours gardé cela en tête. Aujourd’hui, je peux affirmer:”Oui, j’ai connu certainement plus d’échecs que de réussites. Ce métier implique d’avoir une qualité d’écoute, d’attention à l’autre, de l’empathie, tout en ayant du recul et surtout dans des situations critiques « le self-contrôle ». Dans ce métier, il y a tellement de diversité de situations, de problématiques humaines ainsi qu’un éventail large d’activités que nous sommes amenés à nous questionner sur nos comportements, nos attitudes au quotidien. Nous devons apprendre à nous connaître, à apprendre de nos erreurs, à être toujours « humble » devant la personne que nous avons en face de nous.

La formation est très étayée puisque nous abordons la sociologie, la psychologie, la pédagogie, l’ethnologie…

Nous ne sommes pas là pour juger. Nous conseillons, essayons d’amener le jeune et sa famille à entendre ce qui serait le mieux pour eux et les aider pour qu’ils puissent se sortir d’une situation plus ou moins « marginale ».

Dans les établissements avec les personnes handicapées, nous devons essayer, en équipes pluridisciplinaires (AMP, orthophonistes, les kinés, les infirmières, les psys…), d’aider la personne handicapée pour que lorsqu’elle entre institution, elle puisse trouver son épanouissement malgré son état physique ou mental voire autre. Les futurs professionnels devraient avoir un côté très altruiste.

Comment aider les personnes handicapées à s’intégrer dans notre quotidien ?

Des pays sont plus en pointe que nous. Le Canada a développé une politique pour les personnes handicapées beaucoup plus développée que la notre.Un éducateur peut être travailleur social et soignant.

Avant d’être éducateur j’aurais aimé développer la musicothérapie. Quand j’ai commencé mes études c’était très peu connu ici, mais c’était une thérapie utilisée au Canada et en Italie.

A la Seyne, je sais qu’il y a un groupe de théâtre composé de personnes qui ont des difficultés psychiques.Les personnes handicapées peuvent s’insérer aussi par le sport dans les nombreuses disciplines adaptées grâce à handisport. Par exemple : pratiquer le basket à partir de fauteuils roulants adaptés. Des activités pourraient être mises en place dans les Communes pour les valides et les personnes handicapées.

Nous devons participer à rendre les accès plus faciles aux personnes handicapées.. Pour exemple, des rampes d’accès à la Trésorerie ainsi qu’à la Poste ont été mises en place, c’est très bien !

C’est fermé la Trésorerie !

Ils ferment les impôts !

Je change de sujet mais c’est toujours en lien. Nous avons une Maison des Jeunes et de la Culture à Ollioules, qui se trouve près des CRS. Quand une Municipalité veut créer un local pour accueillir les jeunes, elle devrait faire une étude sociologique et l’implanter ensuite où se retrouvent les jeunes. Au lieu d’avoir les jeunes dans le centre ville, les avoir déplacés à l’allée Marguerite semble une « hérésie ». Pour les personnes handicapées, il est important de les intégrer et de leur trouver des activités en Centre-Ville.

Créer des entreprises où les déficients sensoriels peuvent travailler. A Tahiti, où j’étais président de mon association, nous avions des personnes adultes sourdes et muettes, qui travaillaient. Les femmes sourdes faisaient de la couture, les hommes aveugles faisaient du macramé. Un jeune adulte a trouvé un emploi dans un standard téléphonique (avec un appareil en Braille). Pour les garçons, il y avait aussi l’atelier sculpture sur bois, gravure sur nacre…Ils étaient rémunérés en fonction de leur emploi. C’est ce qu’il serait intéressant de créer dans nos communes : des ressourceries ou des épiceries solidaires. Il y a tant de choses à faire, à améliorer.

En ce moment, je me déplace beaucoup sur les trottoirs qui ne sont pas forcément adaptés aux fauteuils roulants.Nous manquons de pistes cyclables. Les vélos qui roulent sur les trottoirs. Des personnes doivent descendre du trottoir car un vélo arrive en face d’elles. Il y a des voitures qui débouchent de chemins et les vélos vont passer devant elles. Un travail de sécurité est à consolider pour les personnes handicapées. Un travail d’insertion professionnelle à mettre en place dans les petites structures. Il suffit d’avoir la volonté de le faire. Les éducateurs techniques apprenaient leur métier à ces jeunes.Ne pas mettre de côté les personnes handicapées. Les mentalités évoluent. Chacun doit trouver sa place qu’il soit valide ou handicapé.

Quand je parle d’aide, ce n’est pas de l’assistanat. Aider c’est rendre autonome la personne, faire en sorte qu’elle puisse s’en sortir par elle-même. Créer une société plus humaine c’est faire en sorte que chacune et chacun ait sa place quelle que soit son identité, sa couleur de peau, sa religion. Quel que soit le handicap ayons un regard bienveillant, et que la personne concernée puisse vivre parmi nous.

Merci Raymond ! Ton intervention est très complète ! Tu nous a amenés vers le sujet de la prévention et du handicap d’une manière très positive et bienveillante.

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